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dimanche 21 août 2011

1 essaouira

Des fouilles archéologiques ont révélé que le site d’Essaouira
était initialement un comptoir phénicien. Vinrent ensuite les
Crétois, les Grecs et les Romains. Mogador, son ancien nom,
provient du mot phénicien Migdol qui signifie “ petite
forteresse ”. En 1506, la ville devait devenir le siège d’une
forteresse portugaise mais fut abandonnée peu de temps après.
La ville actuelle date de 1765, année au cours de laquelle le
Sultan alaouite Sidi Mohamed ben Abdallah décide de
construire un port destiné à offrir au Maroc une ouverture sur le
monde extérieur tout en permettant de développer des relations
commerciales avec l’Europe. Il sollicite alors le concours de
Théodore Cornut, ingénieur spécialiste des fortifications
militaires d’Avignon qui fut fortement influencé par les
fortifications de Vauban à Saint-Malo. Il démantèle
partiellement la forteresse portugaise afin de construire la
Sqala, esplanade dotée d’une rangée de canons. Il organise la
ville en damier, avec des forts inspirés de ceux du Roussillon,
dans la tradition européenne. La ville entière est alors entourée
d’une muraille de style Vauban.
Pendant le règne de Sidi Mohamed ben Abdallah, Mogador
joue un rôle commercial et fiscal non négligeable. Afin de
contrôler le commerce maritime, le Sultan ferme la côte sud
aux marchands européens, obligeant ainsi les consulats
européens de Safi, Agadir et Rabat à s’installer à Mogador, lieu
de concentration de toutes les activités marchandes du sud du
pays. Le nouveau port devient l’un des principaux ports du
pays et, pour être le lieu de destination des caravanes apportant
d’Afrique noire toute une variété de chargements (notamment
des esclaves), il est baptisé “ port de Tombouctou ”.
La ville est alors répartie en trois quartiers distincts. La Kasbah
comprend le vieux quartier administratif. La Médina est
construite entre le XVIIIe siècle et le début du XXe siècle. Elle
est traversée par deux axes principaux, l’un reliant Bab
Doukkala au port et l’autre partant de Bab Marrakech pour
rejoindre la mer. À leur intersection, ou Souk Jdid, sont alors
installés quatre marchés respectivement consacrés au poisson,
aux épices, aux céréales et à l’alimentation générale. Chaque
district porte le nom des tribus impliquées dans l’édification de
la ville.
Le Mellah, quartier juif, joua un rôle important dans l’histoire
de la ville car le Sultan utilisa la communauté juive pour établir
des relations avec l’Europe et organiser des activités
commerciales. Les Juifs furent honorés du titre de Toujjar Es-
Sultan (Marchands royaux), ce qui leur conféra des privilèges
économiques et politiques considérables.
Justification émanant de l’État Partie
Essaouira a joué, depuis sa fondation au XVIIIe siècle et
jusqu’au début du XXe siècle, un rôle fondamental en tant que
port international d’échanges commerciaux entre le Maroc et le
reste du monde. Plusieurs Consulats ainsi que des négociants
de différents pays s’y sont établis.

Essaouira est un exemple majeur de construction inspiré de
l’architecture européenne. C’est une ville unique de par sa
conception : sa réalisation a été faite selon un plan préétabli
(plan Cornut). La médina d’Essaouira fut, dès son origine un
haut lieu de rencontre pacifique entre le modèle architectural et
urbanistique européen et celui propre au Maroc. Une symbiose
s’est établie ainsi entre les techniques de construction du Maroc
et d’ailleurs ce qui a donné naissance à des chef-d’oeuvre
architecturaux uniques (Sqalas du port et de la médina, bastion
de Bab Marrakech, porte de la marine, mosquées, synagogues,
églises, …).
Critères ii et iv



--- NAISSANCE DE LA VILLE ---
DERNIERES NOUVELLES

« La ville s’est fondée par la volonté d’un souverain... le défi est lancé à la violence de l’Océan, à l’incertitude des sables et du destin, un pont est jeté sur le gouffre béant de l’histoire. »
Edmond Amram El-Maleh
Naissance et fondation de la ville - MEMOIRE DU PORT – CARNET DE BORD


Figure centrale et raison même de la ville, Essaouira n’existe pas sans son port. Miracle d’un emplacement un jour compris par les Phéniciens puis, des siècles plus tard, aménagé par décision royale et par la vision de son architecte. Porte océane de l’Afrique vers le reste du monde, le port concentre les échanges, draine des populations hétérogènes et attire successivement plusieurs types d’activités : commerce, conserverie, pêche, construction navale...1


Le site d’Essaouira sert d’escale aux Phéniciens dès le VIIe siècle av. J.-C. et Juba II, roi de Maurétanie, y développe la fabrication de la pourpre au Ier siècle av. J.-C. : il rendra célèbres ces îles qui porteront le nom d’ « îles Purpuraires » en raison de l’exploitation du murex, coquillage dont était extrait la pourpre, très appréciée des notables romains.
La disposition naturelle de la rade, protégée par les îles, construite sur une pointe rocheuse entre atlantique et dunes, forme un port de petites dimensions mais abordable en toutes saisons.
Les Romains, du début de l’ère chrétienne jusqu’à l’invasion des Vandales en 429 continuèrent très probablement cette activité mise en place par l’Empire Carthaginois et le Royaume Maure ainsi que le commerce avec les caravanes : l’île était une base de marins et la plaque tournante des activités de pêche.
Les Romains nomment ce site, Tamusiga ; il continuera plusieurs siècles d’exister, connu sous le nom d’Amogdul, dérivé du nom d’un saint local Sidi Mogdul, patron de la cité et sera mentionné par les géographes « mouillage d’Amogdoul », centre d’un itinéraire commercial caravanier, même s’il n’apparaît sur les cartes maritimes européennes qu’à partir du XIVe comme point côtier intéressant pour la navigation.1


Dom Manuel 1er, roi du Portugal, établit une tête de port commerciale et militaire dès le XVe qu’il baptise Mogdoura, transformé par les Espagnols en Mogadour, puis enfin par les Français en Mogador. Il fait bâtir une forteresse en 1506, à l’entrée du port, le Castello Real (Château Royal), pour assurer la protection de la ville mais qui ne résista pas longtemps aux combattants de la Guerre sainte. Au XVIIe siècle, l’Espagne songe à s’emparer de cette position pour protéger sa route des Indes. Il faudra attendre 1765 pour que naissent véritablement un port important et sa ville.1


Dès son accession au trône, le sultan Alaouite Sidi Mohammed Ben Abdallah fait de Marrakech sa capitale, décide de fonder lui-même une ville et de faire de ce port une base navale, qui reçut le nom d’Al-Suwaira. La construction de la ville, du port et des fortifications, dans le style des forteresses européennes est confiée à T. Cornut, architecte français renommé sous Louis XV pour ses plans de fortification du Roussillon. Le XVIIIe siècle place Essaouira sous les signes de la croissance, du développement, de l’ouverture et de l’équilibre. L’agrandissement, l’embellissement et la modernisation de la cité lui confèrent alors un statut de ville portuaire.1


La fondation même de cette cité témoigne du contexte historique de l’époque et des relations nouvelles engagées avec l’Europe, période marquée par la conclusion de nombreux traités de commerce et d’amitié avec ces nations. Dans cette perspective d’échanges et d’ouverture, la nouvelle cité portuaire est destinée à drainer tout le commerce extérieur du Sud du royaume et la majeure partie du trafic avec l’Europe. Le commerce, dès 1757, a été ouvert par le souverain « à la libre concurrence des pays européens ». A la même époque, il interdit l’exportation des Noirs, en avance sur les pays d’Europe.1


Mohammed III oriente le Maroc vers la façade atlantique : il officialise les relations commerciales et enrichit le trésor par les recettes des douanes. La création de la ville comme les traités passés avec les européens sont l’expression la plus nette d’une politique pacifiste et d’orientation du commerce vers la façade atlantique.1


Pourquoi le choix d’Essaouira ?


Les conditions nautiques d’Essaouira ne sont guère supérieures à celles des autres ports marocains ; formé par un chenal, le port est assez sûr pour les navires moyens mais il manque de profondeur, s’ensable et manque de sûreté en hiver ; c’est la situation générale de la plupart des ports à l’exception de Safi qui possède une meilleure rade. Le Sultan choisit pourtant Essaouira il veut en faire « le point d’arrivée des caravanes sahariennes » et le lieu de rassemblement des commerçants européens. A partir de 1773 et 1780, il interdit le commerce extérieur à Agadir, Fédala, Larache et favorise Essaouira en y abaissant les droits de douanes de 2%. Le trafic concentré en un seul lieu était mieux contrôlable, la contrebande plus facilement surveillée et le budget des douanes, mieux alimenté.1


Au début de l’ouverture du port, 15 bateaux viennent chaque année. En 1780, 12 maisons de commerce y sont établies, rassemblant près d’un millier d’Européens, Anglais, Français, Hollandais, Espagnols. En 1798, 60 navires viennent mouiller à Essaouira.1


Port royal, la cité va progressivement assurer le commerce international du pays et devient le « port de Tombouctou ». Les caravanes subsahariennes apportaient d’Afrique leurs produits à destination de l’Europe. Deux fois par an, en mai et en août, les ventes ou échanges (« le meilleur commerce car le plus sûr », Höst, consul du Danemark à Essaouira, 1781) de marchandises s’effectuent.1


Essaouira : premier port de commerce au début du XIXe siècle


Durant la première partie du XIXe siècle, la ville connut sa période la plus prospère en assurant près de la moitié des échanges maritimes, faisant d’elle le principal port du Maroc.1


En 1800 et sous Moulay Slimane (1792-1822), le commerce se concentre toujours à Essaouira mais aussi à Tanger, où résident désormais les consuls étrangers. En 1821, le port est toujours nettement en tête avec plus de 40% du trafic, suivi de Rabat et Salé, de Tétouan et de Tanger. Larache et Casablanca ne représentent qu’un dixième du commerce extérieur. Safi, Mazagan, Agadir, sont en pleine décadence.1


Le 15 août 1844, après avoir bombardé Tanger, la marine française fait bombarder la ville et le port d’Essaouira. L’histoire raconte que devant la violence du bombardement une grande partie de la population quitte la ville. Les soldats marocains s’inclinèrent. Le sultan Moulay Abderrahmane était si furieux qu’il fit raser la barbe à un groupe de caïds de l’armée, en représailles. La seconde moitié du XIXe siècle voit le début d’un lent déclin dans les échanges extérieurs. Le commerce se focalise sur le centre atlantique, à El Jadida. Sous le protectorat de grands ports sont aménagés, tels ceux de Casablanca et d’Agadir. A l’indépendance en 1957, la ville reprend son nom d’Essaouira (Souira en arabe et Tassourt pour les Berbères).1


Entre dunes et écume, Essaouira maintenait un équilibre, créait un lien entre les longues pistes caravanières et de grandes routes maritimes. De sa fondation jusqu’au début du XXe siècle, la cité recevait les caravanes venant de Tombouctou, du Niger, du Sénégal... chargées de laine, cire, peaux de mouton, cuivre brut, amandes, huile d’argan (utilisée en Europe pour le savon), plumes d’autruches, poudre d’or, gomme arabique, ivoire... Les navires européens qui y font escale exportent ces marchandises vers Londres, Marseille, Amsterdam, Lisbonne ou Livourne... De nos jours Essaouira demeure le 3e port sardinier du Maroc. Si la sardine reste majoritaire, le choix est vaste : pageots, merlus, sars, mulets, espadons, soles, dorades, ombrines, requins...1


« Quand vous vous promenez sur les remparts de la Scala et que vous regardez la ville, son étonnant mariage avec l’océan, ne tentez pas de forcer l’énigme. »
Edmond Amram El-Maleh - La fondation de Mogador


La fondation de Mogador


« En 1766, il est vrai, l’Empereur, par une haine particulière, contre les habitants de Sainte-Croix [Agadir], en expulsa les négociants européens : mais ce fut pour attirer ces derniers à Mogador dont il voulait faire le chef-lieu du commerce marocain et le seul entrepôt des marchandises d’exportation pour l’Europe. A cet effet, Sidi Mohammed voulut d’abord y créer la plus jolie ville de son empire… »
Thomassy R., « Le Maroc - Relations de la France avec cet Empire », Paris, 1859


ANNEXES


  Situation du port : océan atlantique - 31°30’N - 9°47’W


- L’un des ouvrages les plus spectaculaires est la Porte de la Marine, édifiée en l’an 1184 de l’Hégire (1769), pour relier les quais d’embarquement du port à la ville. Depuis la Porte un petit pont conduit à la Scala du port et aux remparts. Le bastion quadrangulaire qui protège la batterie de la Scala du port est surmonté d’échauguettes, constructions en saillie prévues pour garder et défendre un angle mort.1


- Il existe au port deux chantiers navals privés qui s’occupent de la construction et de la réparation des bateaux de pêche. La construction des barques ou des chalutiers (de 20 à 25m) s’effectue selon des techniques ancestrales avec du bois de teck ou d’eucalyptus.1


- La flottille de pêche artisanale est très importante au Maroc : les palangriers, barques en bois (5,40m de long, 2m de large et 0,45m de tirant d’eau) sont plus de 20 000 sur toute la côte marocaine : la plupart de ces embarcations sont construites à Essaouira. Elles affrontent les gros rouleaux, la houle de l’Atlantique et possèdent des qualités marines exceptionnelles. Un chantier naval breton en a effectué une réplique, l’idée étant de a reproduire en conservant ses qualités (stabilité, vitesse, solidité, insubmersibilité) mais en les améliorant en la réalisant dans des matériaux modernes (fibre de verre, résine polyester...). Afin de maintenir le poids d’origine, un lest de 100 kg de plomb a été rajouté à la quille. La première de ces barques, « La Mogador », est née à Sidi Ifni, dans le Sud marocain à l’automne 2005.1
 A partir de 1915, un port à barcasses est aménagé. Deux jetées, ouest et est, d’environ 300m de long chacune, ont été construites. Une passe de 40 mètres donne accès à un bassin intérieur qui fut bordé de terre-pleins et de magasins.1


- La pêche à la sardine à Essaouira utilise des filets tournants. Les pêcheurs retournent chaque jour au port et, malgré leur excellente connaissance des fonds marins, les filets sont perpétuellement à recoudre.1

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